À la croisée de l’expertise médicale et de la politique – Discussion avec l’honorable Flordeliz (Gigi) Osler, notre professeure en résidence de 2024

Inscrivez-vous dès maintenant à la conférence annuelle (virtuelle) de la professeure en résidence le 12 février, de 16 h à 17 h (HE).

L’honorable Flordeliz (Gigi) Osler, sénatrice, M.D., FRCSC est la professeure en résidence de 2024 au Collège royal. En collaboration avec le personnel et l’équipe de direction du Collège royal, elle s’est penchée sur l’éducation en santé et les politiques connexes dans le but d’améliorer les programmes du Collège royal et de contribuer à résoudre la crise nationale des soins de santé. 

Nommée au Sénat du Canada le 26 septembre 2022, l’honorable Flordeliz (Gigi) Osler, sénatrice et chirurgienne de renommée internationale (ORL et chirurgie cervico-faciale), agit pour la cause des soins de santé et est professeure adjointe à l’Université du Manitoba.

Lors de notre récente discussion sur ses activités de représentation pour la cause des soins de santé et son travail lié aux politiques de santé, la sénatrice Osler  a donné aux membres un avant‑goût de sa conférence du mois prochain.

Senator Flordeliz (Gigi) Osler

L’honorable Flordeliz (Gigi) Osler 

Nous tenons à vous féliciter de votre nomination de professeure en résidence au Collège royal en 2024. Pouvez-vous nous parler un peu de vos activités de représentation et de ce qui vous y a mené? 

Je ne me suis jamais engagée intentionnellement dans la voie de la représentation d’intérêts, du leadership médical et des politiques médicales. Or, j’ai constaté que la santé des gens et des populations ainsi que l’amélioration du système de soins de santé nécessitaient l’apport de ceux et celles qui possèdent un bagage clinique. Nous avons besoin de leaders avec un bagage professionnel réel, de leaders qui comprennent à fond les problèmes de santé et de soins de santé au Canada, afin de promouvoir la cause de la santé. Les médecins apportent leur perspective à nos activités de représentation et en tant que leaders en soins de santé.

Comment votre expérience à titre de médecin éclaire-t-elle votre démarche lorsque vous créez ou appuyez des politiques de santé?

Les médecins sont une ressource précieuse, et la crise du système de soins de santé qui sévit actuellement s’aggrave. Nos interactions quotidiennes avec les patients, les patientes et leurs familles nous informent de ce qui fonctionne bien ou non. Les soins de santé font partie des enjeux complexes, du fait, entre autres, des limites constitutionnelles entre les compétences provinciales, territoriales et fédérales.

En tant que médecins, nous pouvons utiliser nos connaissances de première main sur le fonctionnement pratique des politiques – auprès des patients, des patientes et des familles – pour informer les décisionnaires de l’incidence réelle des politiques en vigueur ou en cours de création.

Notre travail de représentation des intérêts doit d’abord être mené auprès des gouvernements provinciaux et territoriaux, où se déroulent surtout l’administration et la prestation des soins de santé. En notre qualité de médecins, je crois que nous devons prendre part aux processus décisionnels et faire partie de l’équipe qui en est responsable.

L’épuisement professionnel des médecins est une préoccupation importante au Canada, l’augmentation des tâches administratives étant une source de stress souvent signalée. Quelles mesures les gouvernements fédéral et provinciaux peuvent-ils prendre pour atténuer l’épuisement professionnel et améliorer le bien-être des médecins?

Réparer le système de soins de santé canadien entraînera une réduction de l’épuisement professionnel des médecins. Le débat sur le sujet a évolué au fil des ans, et je me souviens de l’époque où les stratégies d’atténuation étaient exclusivement axées sur les médecins individuellement. C’est une amélioration de voir les stratégies reconnaître qu’il s’agit plutôt d’une responsabilité partagée entre les médecins et le système de santé.

Le stress découlant de l’alourdissement du fardeau administratif n’est qu’un symptôme. Il faut maintenant mettre l’accent sur la cause du problème et la réforme d’un système de soins de santé qui n’est plus adéquat. En dépit de l’augmentation fulgurante des budgets provinciaux de soins de santé, les inégalités persistent sur le plan des résultats en santé, et l’accès aux soins se détériore partout au pays. Le système de soins de santé canadien doit être fondamentalement remanié et modernisé afin de fournir les soins dont la population canadienne a besoin et qu’elle mérite.

Selon vous, que peuvent faire les médecins au Canada pour influencer les politiques de santé et contribuer à l’orientation future du système de santé (provincial et/ou national)?

Dans son discours du Trône de 2023, Wab Kinew, premier ministre du Manitoba, a déclaré que le cheval économique tire la charrette sociale, ce qui signifie que, pour remplir son mandat, à savoir « réparer les soins de santé et réduire les coûts payés par les familles », le gouvernement devra favoriser la croissance économique. Eh bien, c’est le monde politique qui dirige le cheval économique. Les médecins doivent reconnaître que c’est la scène politique qui détermine l’orientation et les politiques sociales que contient la charrette. L’échelon politique et les décisions qui y sont prises influencent les déterminants sociaux de la santé : le développement de la petite enfance, l’éducation, le logement, les mesures de soutien du revenu, les possibilités d’emploi, le filet de sécurité sociale, etc.

Que peuvent faire les médecins au Canada pour influencer les politiques de santé et contribuer à l’orientation future du système de santé, que ce soit au niveau provincial, territorial ou national? Comprendre le fonctionnement du monde politique. Connaître les politiques. Savoir intervenir sur les deux plans.

Dans quels domaines des politiques de la santé l’opinion des médecins n’est-elle pas prise en compte et comment le processus politique peut-il mieux intégrer leur expertise et leurs points de vue?

Certes, les médecins sont des spécialistes et possèdent une grande expertise de la santé comme de la maladie. Cependant, les médecins maîtrisent moins bien les mécanismes décisionnels en matière de politiques de santé et parfois même le financement, la structure, l’administration et la prestation des soins de santé au Canada. Par exemple, y a-t-il un seul système de soins de santé au pays? Non. Le Canada compte 14 régimes d’assurance maladie, dont 13 provinciaux et territoriaux. Le gouvernement fédéral est responsable des services de santé destinés à des populations particulières, telles que les Premières Nations vivant dans les réserves, les Inuit, les membres des Forces armées canadiennes en service, les anciens combattants et combattantes admissibles, les personnes détenues dans les pénitenciers fédéraux et, dans certains cas, les demandeurs et demandeuses d’asile. Chaque régime de soins de santé est différent et chaque province et territoire administre et fournit différemment les soins de santé.

Pour que le processus politique incorpore efficacement leur expertise et leurs points de vue, les médecins doivent mieux comprendre le fonctionnement du financement, de l’administration et de la prestation des soins de santé dans les provinces et territoires du Canada, ainsi que des politiques et de la politique.

Que conseilleriez-vous aux médecins qui souhaitent participer à l’élaboration de politiques de santé et à des activités de représentation des intérêts au Canada, et exercer une influence dans la sphère publique, que ce soit à l’échelon provincial ou fédéral?

J’aimerais voir un plus grand engagement des médecins à l’égard des politiques de santé et de la représentation des intérêts, mais je sais que les médecins en clinique travaillent très fort et font leur possible. Notre système de santé est mis à rude épreuve. Or, les activités d’élaboration de politiques de la santé et de représentation des intérêts peuvent vous obliger à réduire les soins offerts à un moment où les patients et patientes n’ont pas accès aux soins dont ils ont besoin. La totalité des médecins ne pourra donc pas participer à l’élaboration des politiques de santé et à la représentation des intérêts; une partie des médecins voudra plutôt continuer à fournir des soins cliniques, et c’est très bien. Si vous souhaitez élaborer des politiques de santé et agir pour faire avancer des causes, vous devez acquérir le plus de connaissances et de compétences possible. Des programmes sont offerts à la communauté résidente et aux médecins, comme des cours sur le leadership et une maîtrise en santé publique ou en politiques de santé. Vous devez également bâtir votre réseau et sur le plan organique, trouver les politiques de santé qui motiveront vos activités de représentation et vous amèneront à diriger de façon authentique et intègre.

Pouvez-vous nous donner quelques détails sur ce à quoi les membres du Collège royal peuvent s’attendre lors de votre conférence en février? Qui devrait y assister et pourquoi?

J’aimerais que le plus grand nombre possible d’Associé·es et de chefs de file de la médecine et des soins de santé provenant d’organisations provinciales, territoriales et nationales y assistent. Le but est de susciter des discussions intéressantes sur les connaissances et les compétences dont les médecins ont besoin pour présenter des arguments convaincants sur la scène politique. Nous discuterons de l’engagement politique dans une ère de division, de partisanerie et d’incivilité.

La conférence annuelle de la professeure en résidence se tiendra en mode virtuel le 12 février, de 16 h à 17 h (HE).

Inscription à la conférence.

Chaque année, le Collège royal favorise l’innovation et l’échange de connaissances en invitant, par l’entremise de son Programme de professeur·es en résidence, une sommité dans son domaine à se joindre à l’équipe de direction pour examiner la formation en santé et les politiques de santé, et ce, dans le but d’améliorer ses programmes. La personne invitée présente également la conférence annuelle de la professeure en résidence du Collège royal.